Le quasi-usufruit
Le démembrement de la propriété consiste en la séparation des différents pouvoirs que possède un propriétaire sur son bien. La pleine propriété est ainsi divisée en deux parties :
- L’usufruit qui regroupe l’usus (le droit d’user de la chose) et le fructus (le droit d’en percevoir les fruits) ;
- La nue-propriété avec l’abusus (le droit de disposer de la chose).
Le mécanisme du quasi-usufruit
L’article 578 du Code civil définit l’usufruit comme « le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à charge d’en conserver la substance ». Il porte sur des biens meubles ou immeubles.
S’il venait à porter sur une somme d’argent ou sur un bien consomptible (biens que l’on ne peut pas utiliser sans les consommer) par le premier usage, on parle alors de quasi-usufruit. Ici, il n’est donc pas possible d’en conserver la substance. L’avantage réside alors dans le droit de jouir et de disposer de la chose.
En utilisant le bien, le quasi-usufruitier se comporte comme un plein propriétaire, excepté l’existence d’une créance de restitution. L’article 587 du Code civil prévoit que l’usufruitier a le droit de se servir des choses, « mais à la charge de rendre, à la fin de l’usufruit, soit des choses de même qualité et qualité, soit leur valeur estimée à la date de restitution ». Le nu-propriétaire devient alors créancier du quasi-usufruitier.
Quand le quasi-usufruit porte sur une somme d’argent, la restitution sera égale à la somme de départ, peu importe que la monnaie ait pu prendre ou perdre de la valeur. Il s’agit du mécanisme de nominalisme monétaire prévu à l’article 1895 du Code civil.
Le quasi-usufruit peut être légal ou conventionnel (article 579 du Code civil).
Le quasi-usufruit légal
Il résulte le plus souvent d’une succession dans le cadre de la dévolution légale en présence d’un conjoint survivant usufruitier et d’enfants communs. L’article 757 du Code civil prévoit que le conjoint peut opter pour l’usufruit des biens de la succession. Si l’actif successoral comporte des biens consomptibles, il exercera alors un quasi-usufruit sur ces biens.
Il peut également résulter du cas de la jouissance légale des parents sur les biens de leurs enfants mineurs, prévue par l’article 386-1 du Code civil.
Le quasi-usufruit conventionnel
Ce dernier résulte de la volonté des parties d’appliquer le régime du quasi-usufruit sur des biens consomptibles non prévus par la loi ou d’étendre, par une convention, ce régime à des biens non consomptibles par nature. Il faut alors que le bien soit fongible, c’est-à-dire déterminable par son espèce et sa quantité.
Une telle convention permettra également de :
- Définir la valeur de la créance de restitution et son éventuelle indexation ;
- Définir le paiement des impositions sur les revenus et les plus-values ;
- Déterminer les obligations du quasi-usufruitier ;
- Porter la créance de restitution au passif de la succession de l’usufruitier afin d’éviter une double imposition à son décès.
L’impact de la loi de Finances pour 2024 sur le quasi-usufruit
En principe, la créance de restitution s’inscrit au passif de la succession, réduisant ainsi l’assiette des droits de succession (article 768 du Code général des impôts).
La loi de finances pour 2024 met fin à ce principe avec la création de l’article 774 bis du Code général des impôts. Il limite la portée fiscale de la convention d’usufruit en rendant les dettes de restitution portant sur une somme d’argent non déductibles de l’actif successoral dans l’hypothèse où le défunt s’était réservé l’usufruit, pour les successions ouvertes à compter du 29 décembre 2023.
Cependant, la déductibilité de ces dettes est maintenue en cas de but non principalement fiscal.
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