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La prise d’acte de la rupture du contrat de travail

La prise d’acte de la rupture du contrat de travail

Publié le : 13/02/2023 13 février févr. 02 2023


Généralement, le contrat de travail est rompu par le salarié (démission), son employeur (licenciement) ou d’un commun accord (rupture conventionnelle.) 

Mais il existe également une voie judiciaire qui peut être déclenchée par le salarié : la prise d’acte de la rupture du contrat de travail.

Formalisme simple mais justification nécessaire

La prise d’acte peut être effectuée à tout moment, par tout salarié, qu’il soit en contrat à durée déterminée ou indéterminée, à l’exception notable de la période d’essai. Elle ne requiert pas de formalisme particulier, mais doit tout de même être formulée par écrit à l’attention de l’employeur afin que celui-ci soit informé d’un certain nombre d’éléments, et notamment de la liste précise des reproches formulés à son encontre.

Les reproches justifiant la prise d’acte sont variés et peuvent correspondre à :

-    des faits de harcèlement ou de discrimination de la part de l’employeur ; 
-    une modification unilatérale du contrat de travail, sans l’accord du salarié; 
-    ou encore une absence d’organisation des visites médicales obligatoires. 

Enfin, le non-paiement de tout ou partie du salaire constitue également un motif justificatif. A ce titre, une décision intéressante de la Cour de cassation (Cass. soc. 06/07/2022, 20-21.690) a précisé qu’un retard de paiement de 10 jours était suffisant pour prendre acte de la rupture du contrat de travail.

Des conséquences immédiates

Le salarié qui prend acte de la rupture du contrat de travail estime la situation assez grave pour que la relation avec son employeur se termine immédiatement. 

En conséquence, dès la prise d’acte, le contrat de travail prend fin et le salarié n’a pas d’obligation de respecter une période de préavis. L’employeur est également dans l’obligation de lui fournir un certain nombre de documents justificatifs, dont le certificat de travail, l’attestation pôle emploi, le solde de tout compte et l’état de l’ensemble des dispositifs de participation et d’intéressement concernant le salarié.
 

La saisine indispensable du conseil de prud’hommes

Prendre simplement acte de la rupture et formuler certains reproches ne suffit pas. Le salarié doit saisir le conseil de prud’hommes afin que celui-ci rende une décision. Celui-ci va évaluer si les motifs de rupture évoqués par le salarié étaient suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Le conseil de prud’hommes dispose d’un mois pour statuer à compter de la demande du salarié (article L.1451-1 du Code du travail). Les conséquences de sa décision vont varier selon qu’il estime que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail est justifiée ou non.
 

Requalification de la rupture du contrat par le conseil de prud’hommes

Si le conseil estime que la prise d’acte par le salarié était justifiée, il va juger que celle-ci produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (ou d’un licenciement nul dans le cas de faits de harcèlement ou discrimination, ou s’il s’agit d’un salarié protégé.) L’employeur sera par conséquent redevable des indemnités prévues dans ce cas : indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, indemnités compensatrices de congés payés et de préavis, et bien sûr dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (ou licenciement nul).

Si, en revanche, le conseil se prononce en défaveur des reproches invoqués à l’encontre de l’employeur, il jugera que la prise d’acte produit les effets d’une démission. Les conséquences sont alors différentes puisque c’est le salarié qui sera redevable d’une indemnité compensatrice de préavis. Il aura cependant droit à une indemnité compensatrice pour les congés payés non pris à la date de la rupture.

La prise d’acte est donc une option à double tranchant, à utiliser par le salarié uniquement lorsqu’il pense pouvoir appuyer solidement sa décision de rompre le contrat. 

Outre le risque de requalification en démission, le salarié doit tenir compte du fait que même si la rupture produit les effets d’un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse, il ne pourra percevoir les allocations chômage qu’une fois la décision du conseil de prud’hommes rendue.


GILLES Avocats

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