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Le délit de dénonciation calomnieuse

Le délit de dénonciation calomnieuse

Publié le : 12/03/2025 12 mars mars 03 2025

L’adage latin « falsus in uno, falsus in omnibus » - « faux pour une chose, faux pour le tout » - illustre parfaitement le délit de dénonciation calomnieuse. Accuser mensongèrement une personne ne relève pas de l’erreur : c’est un acte grave qui crée un risque pour la personne calomniée, celui d’être indûment poursuivie, parfois avec des conséquences effrayantes (incarcération, licenciement, destruction de la famille...). Si la justice devient un outil pour se venger ou servir ses intérêts personnels, c’est l’édifice judiciaire tout entier qui peut vaciller.

La dénonciation calomnieuse est très rarement poursuivie spontanément par les parquets. J’ai même entendu récemment un procureur requérir que déposer plainte faisait partie de la liberté d’expression !

Il ne faut cependant pas hésiter à engager une action contre le calomniateur, ne serait-ce que pour l’arrêter dans ses méfaits, ces individus ayant une tendance forte à multiplier leurs plaintes mensongères si nul ne les sanctionne.

 

Les éléments constitutifs de l’infraction 

L’article 226-10 du Code pénal encadre strictement ce délit, en sanctionnant toute personne qui dénonce un fait qu’il sait pour partie ou totalement inexact. Pour que l’infraction soit caractérisée, plusieurs conditions doivent être réunies :
 
  • La dénonciation est dirigée contre une personne identifiée ou identifiable ;
  • Le fait dénoncé est de nature à entraîner des sanctions judiciaires, administratives ou disciplinaires ;
  • L’auteur est de mauvaise foi en ce qu’il sait que sa plainte est totalement ou partiellement mensongère ;
  • La dénonciation est spontanée, et non le résultat d’une contrainte ou d’une demande expresse (cass. crim du 25 juin 2024, n°22-87.000) ;
  • Elle est adressée à une autorité susceptible d’y donner suite : un officier de police administrative ou judiciaire, une autorité ayant le pouvoir d’y donner suite ou de saisir l’autorité compétente (cass. crim du 8 janvier 2025, n°23-84.535), un supérieur hiérarchique ou l’employeur du mis en cause.

L’élément moral de l’infraction repose sur l’intention coupable de l’auteur : il doit savoir que les faits rapportés sont inexacts. La seule volonté de nuire ne suffit pas à caractériser l’infraction, notamment si l’auteur croyait en toute bonne foi à la véracité des faits dénoncés.

La dénonciation calomnieuse se distingue de l’injure, qui n'est fondée sur aucun fait précis, et de la diffamation, qui peut être constituée même si les faits relatés sont exacts. La particularité de la dénonciation calomnieuse réside dans l’exigence du mensonge : une fausse accusation, qu’elle soit partielle ou totale, est indispensable pour qualifier l’infraction.

 

La sanction de l’infraction

La dénonciation calomnieuse est une infraction instantanée. Dès lors, le délai de prescription de l’action publique, de 6 anscourt à partir du jour où la dénonciation parvient à l’autorité compétente. Le délai est néanmoins suspendu durant toute la procédure subséquente à la plainte.

L’auteur des faits encourt une peine de 5 ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amendeLa tentative n’est pas punissable.

La lourdeur des peines encourues souligne la contradiction des parquets, qui rechignent à poursuivre une infraction considérée comme grave par le législateur, et qui l’est objectivement au regard des conséquences délétères qu’elle peut engendrer.


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