Indemnisations pour accident du travail et harcèlement moral sont cumulables
Publié le :
28/02/2020
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Par principe, le Code de la sécurité sociale empêche le salarié ayant reçu une indemnisation au titre de la reconnaissance d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, d’engager une action visant à obtenir des dommages et intérêts pour les conséquences subies par ce même accident ou maladie (article L451-1).
Mais, des exceptions sont prévues, notamment si l’accident de travail ou la maladie professionnelle sont consécutifs à une faute inexcusable de l’employeur. Ce droit a été posé par un arrêt de principe de la Cour de cassation, expliquant que « lorsqu’un salarié licencié au motif d’une inaptitude consécutive à une maladie professionnelle qui a été jugée imputable à une faute inexcusable de l’employeur, il a droit à une indemnité réparant la perte de son emploi due à cette faute » (Cass. soc 17 mai 2006 n°04-47.455).
Position récemment réaffirmée par la chambre sociale qui explique la possibilité de cumul entre prise en charge de l’accident de travail et versement de dommages et intérêt.
Dans le cas étudié, après avoir subi des faits de harcèlement moral, notamment par une pression régulière et des remarques humiliantes de son supérieur, un salarié fait une tentative de suicide, prise en charge par le régime d’indemnisation des accidents du travail.
La juridiction de sécurité sociale rejette toutefois la requête du salarié sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, et forme la même demande pour le versement de dommages et intérêts, auprès du Conseil de prud’hommes.
La Cour d’appel saisie des griefs condamne l’employeur au paiement de dommages et intérêts, qui se pourvoi alors en cassation reprochant au salarié d’avoir introduit la même demande à la fois devant la juridiction prud’homale et le Tribunal des affaires de Sécurité sociale. Pour l’entreprise, l’indemnisation des dommages résultant d’un accident de travail relève de la compétence exclusive de la juridiction de sécurité sociale, et en l’espèce cette dernière a déjà rejeté la faute inexcusable et réparé le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, par l’octroi d’une rente accident du travail.
Mais, la Cour de cassation rejette la demande de l’employeur et relève que dans les faits, les agissements de harcèlement moral étaient distincts des conséquences de la tentative de suicide réparée par le régime des accidents du travail. La chambre sociale rappelle que la législation en matière d’accident du travail et de maladie professionnelle ne fait pas obstacle à l’attribution de dommages et intérêts aux fins de réparer le préjudice causé par le harcèlement moral dont le salarié a été victime antérieurement à la prise en charge de son accident de travail.
La Cour prend soin de souligner cette distinction, sans tenir compte du fait que le harcèlement moral soit la conséquence directe de la survenance de l’accident justifiant l’indemnisation. Elle fait ainsi la distinction entre deux préjudices spécifiques, celui antérieur à l’accident compétence de la juridiction prud’homale: le harcèlement moral, de celui postérieur, c’est-à-dire les conséquences de l’accident lui-même, compétence du Tribunal des affaires de Sécurité sociale.
Avec cette interprétation la Haute juridiction rappelle qu’il est possible de faire échec au principe de double réparation en cas de faute inexcusable, lorsque des préjudices distincts sont observés, permettant alors le cumul des indemnisations, et ainsi une réparation intégrale du préjudice du salarié.
Référence de l’arrêt : Cass. soc 4 septembre 2019 n°18-17.329
Marion Glorieux, Legal Content Manager - AZKO
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