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Le refus de remettre le code de déverrouillage d'un téléphone est-il constitutif d'un délit ? - Crédit photo : © Cass. crim 13 octobre 2020 n°20-80.150
Crédit photo : © Cass. crim 13 octobre 2020 n°20-80.150

Le refus de remettre le code de déverrouillage d'un téléphone est-il constitutif d'un délit ?

Publié le : 09/12/2020 09 décembre déc. 12 2020

La plupart des téléphones sont aujourd’hui équipés de codes permettant un déverrouillage et un accès au contenu, uniquement pour la personne en possession de la clé de déverrouillage. En droit, cette technologie est qualifiée de « convention secrète de déchiffrement ». 
En matière pénale, le contenu du téléphone d’un placé en garde à vue peut être un élément déterminant dans la collecte de preuve en lien avec l’infraction, pour autant, le refus de transmettre le code de déverrouillage d’un téléphone est-il constitutif d’un délit ? 

La Cour de cassation a récemment apporté des précisions concernant cette interrogation.

Les faits en question sont relatifs à une arrestation dans le cadre d’une enquête d’infraction à la législation des stupéfiants. En cours d’audition, un suspect placé en garde à vu s’est vu réclamé par un fonctionnaire de police, les codes d’accès de trois téléphones portables dont il avait possession, convention secrète de déchiffrement qu’il s’est refusé de communiquer. 

Devant la Cour d’appel, le prévenu a été reconnu coupable pour les infractions liées à la réglementation sur les stupéfiants, mais relaxé concernant les chefs de demande relatifs au refus de remettre une convention sécrète de déchiffrement. La juridiction d’appel a considéré que le code de déverrouillage d’un téléphone portable d’usage courant, qui ouvre l’accès aux données qui y sont contenues, ne constitue pas une convention secrète d’un moyen de cryptologie, en ce qu’il ne permet pas de déchiffrer des données ou messages cryptés.

Le Ministère public a donc formé un pourvoi en cassation contre cette relaxe. 

Pour apporter une solution, la Cour de cassation se réfère à l’interprétation qui doit être faite de l’article 434-15-2 du Code pénal, lequel dispose : « Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 270 000 € d'amende le fait, pour quiconque ayant connaissance de la convention secrète de déchiffrement d'un moyen de cryptologie susceptible d'avoir été utilisé pour préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit, de refuser de remettre ladite convention aux autorités judiciaires ou de la mettre en œuvre, sur les réquisitions de ces autorités délivrées en application des titres II et III du livre Ier du code de procédure pénale.

Si le refus est opposé alors que la remise ou la mise en œuvre de la convention aurait permis d'éviter la commission d'un crime ou d'un délit ou d'en limiter les effets, la peine est portée à cinq ans d'emprisonnement et à 450 000 € d'amende
».

Dans sa décision, la Haute Juridiction admet que la demande de l’officier de police de transmettre les codes de déverrouillage n’était pas une réquisition au sens de l’article, mais constituait « une simple demande formulée au cours d’une audition, sans avertissement que le refus d’y déférer est susceptible de constituer une infraction pénale ». 
En revanche, la notion de téléphone d’usage telle qu’évoquée par la Cour d’appel est rejetée, et l’arrêt est cassé en ce sens, pour méconnaissance de la définition légale rattachée à la convention secrète de déchiffrement

Pour la chambre criminelle, l’article 29 de la loi du 21 juin 2004 (n° 2004-575) est clair « la convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie contribue à la mise au clair des données qui ont été préalablement transformées, par tout matériel ou logiciel, dans le but de garantir la sécurité de leur stockage, et d’assurer ainsi notamment leur confidentialité ».

Ainsi, le fait pour un téléphone d’être équipé d’un moyen de cryptologie constitue la condition permettant de valider que l’équipement est concerné par une convention secrète de déchiffrement, dont le refus de communication, constitue une infraction pénale.  


ATIAS & ROUSSEAU

Référence de l’arrêt : Cass. crim 13 octobre 2020 n°20-80.150

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