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Saisie immobilière lorsque la société poursuivie n'est pas propriétaire du bien saisi

Saisie immobilière lorsque la société poursuivie n'est pas propriétaire du bien saisi

Publié le : 01/07/2021 01 juillet juil. 07 2021

« La saisie immobilière, qui est une mesure temporaire et à caractère provisoire n’entraînant aucun transfert de propriété, les biens immobiliers appartenant à un tiers ne peuvent être saisis que dans leur totalité, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi ». 

Telle est la solution qui a été retenue par la Cour de cassation dans un arrêt du 10 mars dernier. 

Pour exposer les faits, une société candidate à des marchés publics organisés par le ministère de la Défense, a dénoncé auprès du procureur de la République des faits susceptibles de constituer un délit d’atteinte à la liberté d’accès et à l’égalité des candidats dans les marchés publics
En effet, elle a constaté que plusieurs marchés auraient en effet été attribués à une entreprise, alors le matériau (un tissu) présenté par celle-ci comme échantillon s’est révélé non conforme à la spécification imposée par le règlement de la consultation des marchés.

Au regard des investigations menées, il est rapidement apparu que cette société aurait fait l’objet de favoritisme de la part du personnel du ministère de la Défense, notamment par l’attribution d’une note technique excessive au regard de la qualité de son échantillon, en lui fournissant des informations privilégiées sur les termes des marchés, et en demandant à la direction centrale du service des essences des armées d’homologuer le tissu de la société pour une durée de dix ans, lui garantissant ainsi un faux niveau de qualité. 

Lors d’une enquête préliminaire, la saisie d’un immeuble appartenant à une société détenue par la société mise en cause est ordonnée. 

La contestation de cette saisie immobilière est portée jusque devant la Cour de cassation, où la société propriétaire du bien évoque le fait que les biens appartenant à un tiers de bonne foi ne peuvent faire l’objet d’une mesure de saisie pénale immobilière. 
Il est d’une part reproché à la Cour d’appel ayant confirmé la saisie d’avoir autorisé celle-ci sur la valeur de l’ensemble immobilier appartenant à la société propriétaire, tiers à la procédure en retenant simplement le fait que la société poursuivie pour délit en avait la libre disposition, sans prendre en compte le fait que la société propriétaire de l’immeuble était de bonne foi. 
D’autre part, la société propriétaire du bien soulève le caractère disproportionné de la mesure compte tenu de la valeur du bien qui a été saisi dans sa totalité et qui est nettement supérieure au montant de l’infraction. 

L’ensemble de ses arguments sont rejetés par la chambre criminelle qui confirme le constat fait par la Cour d’appel selon lequel le dirigeant de la société poursuivie pour recel d’atteinte à la liberté d’accès et à l’égalité des candidats dans les marchés publics, est l’unique associée de la société qui est propriétaire de l’immeuble objet de la saisie pénale. 

Preuve est apportée de la mauvaise foi de la société propriétaire. La Haute juridiction rappelle alors le principe indivisibilité de la saisie pénale immobilière, au visa de l’article 706-151 alinéa 2, du Code de procédure pénale : « la saisie immobilière, qui est une mesure temporaire et à caractère provisoire, n’entraînant aucun transfert de propriété, les biens immobiliers appartenant à un tiers ne peuvent être saisis que dans leur totalité, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi ». 

La bonne foi du demandeur étant exclue, rien n’empêche la saisie complète du bien à titre temporaire et provisoire. 
Seule la prononciation d’une peine de confiscation à l’issue de la procédure d’instruction permettra de limiter la valeur de la part saisie au montant de la peine. 


ID FACTO

Référence de l’arrêt : Cass. crim 10 mars 2021 n°20-84.117
 

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