
Désordres décennaux : le juge ne peut ignorer les conclusions claires de l’expert
Publié le :
01/08/2025
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En matière de construction, les désordres affectant un ouvrage peuvent engager la responsabilité décennale du constructeur dès lors qu’ils compromettent la solidité de l’immeuble ou le rendent impropre à sa destination. Encore faut-il que le juge tienne compte des éléments objectifs versés au débat, notamment les conclusions non équivoques d’un expert judiciaire. C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt du 5 juin 2025.
Dans cette affaire, dans le cadre d’un contrat de construction de maison individuelle, des particuliers avaient confié la construction de pavillons à une société, mais après réception, avaient constaté des fissures sur les murs extérieurs de certains ouvrages.
Une expertise judiciaire avait été diligentée, concluant à divers désordres, notamment de couverture et de fissuration, affectant certains pavillons.
Sur la base de ce rapport, les maîtres d’ouvrage avaient assigné l’assureur du constructeur en indemnisation, invoquant la responsabilité décennale prévue à l’article 1792 du Code civil.
En première instance, le juge leur donne raison et retient que les désordres d’un des pavillons rendent l’ouvrage impropre à sa destination, mais la Cour d’appel infirme partiellement ce jugement, estimant que les désordres constatés ne seraient que d’ordre esthétique, en se fondant exclusivement sur le tableau synthétique de l’expertise (annexe 5), dans lequel était cochée la case « désordre esthétique ». Elle considère que cette qualification n’a pas été discutée par les parties.
C’est précisément ce que contestaient les maîtres d’ouvrage, qui faisaient valoir que l’expert avait mentionné, dans le corps même du rapport, des fissures « évolutives susceptibles d’affecter l’usage » du pavillon, au point de le rendre impropre à sa destination.
La Cour d’appel, sans tenir compte des termes clairs et précis des écritures des parties ni de la nuance apportée dans le rapport d’expertise lui-même, a commis une erreur, selon la Cour de cassation qui censure cette dénaturation de l’écrit, au visa du principe selon lequel le juge ne peut modifier la portée des pièces qui lui sont soumises.
La Haute juridiction rappelle que l’appréciation du caractère décennal d’un désordre ne peut se faire au prix d’une lecture partielle et figée du rapport d’expertise, et que le juge ne peut écarter les griefs des parties en se fondant sur un extrait isolé du dossier, sans examiner l’ensemble des éléments contradictoirement versés au débat.
VILA Avocats
Référence de l’arrêt : Cass. civ 3ème du 5 juin 2025, n°23-19.787
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